Dans la Sémantique Interprétative, quatre composantes semblent interagir lors des processus interprétatifs [57] :
Or une interprétation ne peut pas être limitée à un ensemble de structures isotopiques. Les autres composantes, et surtout leurs interactions, doivent aussi être pris en compte. Et la modélisation d'une classe sémantique qui se veut généralisée doit pouvoir, au moins, capter des aspects de chacune des quatre composantes. Nous présentons donc la manière dont nous avons envisagé la prise en compte de ces composantes dans notre modélisation d'une structure sémique.
Avant de présenter ces quelques extensions, nous tenons à affirmer l'échec de notre effort d'intégration uniforme des quatre composantes et de leurs interactions. Un effort que nous avons effectué à deux reprises au cours de notre travail. Plus concrètement nous n'avons pas pu établir un cadre formel simple (i.e. à l'aide de CS) qui permet, dans le cas général d'une analyse, de décrire de manière uniforme les rapports et interactions entre les différentes composantes. La raison principale est la forte corrélation entre les composantes. Un résultat interprétatif issu d'une composante (e.g. structure dialectique d'un récit) peut être repris par une autre (e.g. la structure dialectique peut être dialogiquement annotée : elle peut être issue de la présentation des faits par l'actant X, tandis que l'actant Y a une autre version des faits), le tout pouvant être intégré dans une troisième (e.g. dans un ordre tactique, en présentant d'abord la vision d'un actant non crédible et ensuite la vision de l'univers de référence) pour être finalement caractérisé par la quatrième composante6.1 (e.g. il s'agit d'une thématique de mystère dévoilé par le détective à la fin du récit). Nous ne pouvons donc pas modéliser les interactions à l'aide de CS d'un même niveau. Pour ce faire, il nous faudrait plutôt, établir des niveaux supérieurs pour chaque nouvelle interaction. Mais ce faisant, la structure sémique explose rapidement, de même, tout effort de formalisation uniforme simple.
Ceci étant, et dans l'attente d'une troisième reprise du même effort, nous présentons la manière dont les composantes sémantiques peuvent être prises en compte par notre formalisme.
Nous commençons par un exemple tiré de la tactique de
l'expression. Dans le modèle théorique la position d'une entité
textuelle est connue (par exemple, pour une lexie
,
la
position est la deuxième projection du triplet
l=(lc, p, t)). Ceci
permet de représenter l'ordre syntagmatique pour un ensemble de
lexies au sein d'un texte. Formellement, ceci se fait à l'aide d'une
primitive nouvelle, qui participe dans une RE connectant la
lexie à une propriété d'ordre tactique (cf. fig. 6.2).
Si l'on prend en compte les détails de la position p (e.g. la ligne
et la colonne) nous pouvons facilement introduire dans le formalisme
une tactique bi-dimensionnelle, où les lexies obtiennent une
double caractérisation dans un tableau tactique, cf. la
fig. 6.1, souvent utile pour les poèmes.
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Plus qu'une caractérisation en lignes et colonnes, dans la tactique de l'expression peuvent apparaître des relations entre blocs textuels. Une lexie d'un texte peut automatiquement obtenir une caractérisation par rapport à la phrase qui la contient, par rapport au paragraphe, à la section, à l'ordre relatif à une énumération explicitée (e.g. dans un document formaté à l'aide d'un standard SGML6.2, ou même dans un document de type LATEX), etc. Ces caractérisations peuvent prendre la forme d'une RE, et ensuite être utilisées dans un rythme sémantique, cf. la fig. 6.2.
Dans le cadre d'une tactique du contenu les rythmes (e.g. rythmes thématiques) sont les plus utilisés dans [57]. La représentabilité de ces structures nécessite des relations entre classes entières. Un rythme thématique sera donc représenté par une interclasse ( ICS, cf. 4.3.5) basée sur une CS de type tactique de l'expression et une (ou plusieurs) CS de type thématique (e.g. isotopique), cf. fig. 6.2.
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L'introduction de la dialogique demande aussi les structures de type interclasse : un univers correspond à un ensemble de CS (une ICS), structuré à l'intérieur selon le monde (e.g. factuel, contrefactuel, possible) auquel chaque CS appartient.
De cette manière nous pouvons étendre la formation de nouvelles CS (ou ICS) et, en même temps, y ajouter des contraintes supplémentaires :
Nous pouvons sans doute continuer en ajoutant des contraintes
supplémentaires. Par exemple, une opposition thématique, c.-à-d. une RE (x,z,y) et son opposée
,
n'est pas permise au
sein d'une CS, ni au sein d'un seul monde, ni entre les CS participant à un même parcours interprétatif (c.-à-d. passage
interprétation
interprétant
nouvelle
interprétation).
L'extension et l'affinement d'un modèle est certes pratiquement infinie. Dans notre cas, c'est le cadre applicatif qui détermine les besoins en termes de structures sémiques. Précisément, la modélisation informatique (cf. le chapitre précédent) est suffisamment modulaire pour permettre à l'ingénieur du système de procéder rapidement à un élargissement de la partie structures sémiques du modèle statique sans grande perturbation pour le reste de l'application.
Nous continuons tout de suite sur ces possibilités applicatives.